« Les mots qui vont surgir savent de nous des choses que nous ignorons » René Char
Comment un geste aussi anodin comme de recoudre un bouton peut faire revivre une jolie histoire d’amour jamais avouée.
Tu disais, tu me disais, pas la couture
Pour vous mes filles, c’est trop dur.
Mais un jour tu m’as donné ton dé
À coudre et ton nécessaire à repriser.
Tu m’as dit, à toi il servira
Et alors à moi tu penseras.
Ce matin coulent mes larmes
Sur l’ouvrage et me désarment.
Ton dé en cuivre a un peu terni
Les bobines de fil ont un peu vieilli
Je te revois, penchée sur ta couture
Ce souvenir de toi me claquemure
Je revois tes doigts qui ourlaient
Les jolies robes que tu me cousais
Je t’entends fredonner les couplets
Des chants que tu affectionnais
Le cœur battant, les mains tremblant
J’ai enfilé ton dé à coudre lentement
Sur mon doigt, qui me va comme à toi
Et je repense à ces moments de joie
Tu as gagné. Tu l’avais prédit
Je couds avec ton souffle sur moi
Tu as gagné. Ton dé à mon doigt
M’étreint le cœur et m’estourbit
La fière s’incline devant l’évidence
Avec le temps je sais que je suis tout toi
Et plus encore avec ce dé au doigt
Qui me rappelle à jamais ta présence
Je couds, mes larmes ravalées
Tu n’as jamais voulu m’apprendre
Mais je t’ai tellement observée
Qu’en ce jour je peux entreprendre
« Tire, tire, tire l’aiguille ma fille
Demain, demain tu te maries »
Ton parfum envahit tout l’espace
Ton ombre en moi prend sa place
Je pense à toi, tu l’avais prédit
Tu vis en moi, j’ai gagné aussi.