La vie d’auteur n’est pas de tout repos.
En discutant hier avec une amie, je me suis souvenue d’un entretien que j’avais eu avec un éditeur, m’invitant à aller à sa rencontre pour lui présenter mon tapuscrit : « retourne de là où tu viens ». Après m’avoir fait attendre plus d’une heure dans une salle, sorte de pool de dactylos qui me regardaient à la sauvette, il sortit de son bureau, accompagné d’un jeune homme, s’écriant à la volée « Mesdemoiselles, je vous présente notre nouvel auteur, ce qu’il a écrit est une merveille ». Une mise en scène imparable pour affrioler mon cœur !
C’était mon premier contact avec un éditeur, ma première fois où je présentais mon tapuscrit. Je n’étais pas du sérail. Je ne connaissais rien à ce monde. J’étais naïve. Je le suis encore.
Donc revenons au loup. Ce loup qui n’aspirait qu’à faire une bouchée du petit agneau que j’étais. Je lui tendis mon tapuscrit. Il l’ouvrit au hasard : « ah vous parlez de drogue ! ». J’ouvris de grands yeux, lui corrigeai vivement son erreur !
Le loup se transforma en coq et me dit : « pour un premier roman, c’est 3000 euros et le prochain sera gratuit ». Sans même avoir pris connaissance de mon « chef d’œuvre » ! Il n’eut pas le temps de chanter « cocorico » parce que j’avais repris mon tapuscrit et filé sans demander mon reste ! Une idée avait germé dans ma tête : je serai éditrice.
En rentrant chez moi, je me suis demandé pourquoi il m’avait parlé de drogue. J’ai relu mon tapuscrit et je suis partie d’un fou rire, mais un fou rire et j’ai hurlé « mais quel con » !
Là je sens que vous ne suivez plus. Attendez ! Ne partez pas ! Je vous explique.
En fait j’avais écrit « l’écriture est ma drogue » et il s’était juste arrêté sur un mot ! Mais le bon ! Oui je parlais de drogue dans mon livre. Cette drogue douce qu’est l’écriture. Celle qui m’a fait connaître tant d’émotions, rencontrer tant de belles personnes… Treize ans déjà avec à la clé douze romans adultes et jeunesse confondus !
Quelques années plus tard, j’étais en dédicace dans un salon du livre, le loup/coq transformé en petite souris grise est passé voir ses auteurs ; il a regardé mes cinq livres étalés sur la table, a hoché la tête et m’a dit « avec vous j’ai raté le coche ». Je me suis bien gardé de lui rétorquer « c’est ça qui est moche » !
Il ne se reconnaitra pas car il n’est plus de ce monde. Moi d’ici-bas, je ne le remercierai jamais assez d’avoir titillé ma fierté !
La morale de cette histoire « jugement hâtif, jugement fautif » !
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