Les salons du livre se suivent et ne se ressemblent pas. Je vous entretenais précédemment du salon "des livres & vous" et j'étais ravie d'y aller, d'intervenir aux tables rondes et de revoir tous mes amis auteurs.
Toujours dans la peur de rater un train, je suis arrivée, très en avance, dans les toutes premières. Cela m'a permis de choisir ma place, de m'installer puis de m'entretenir tranquillement avec les animatrices. Très bel accueil souriant. Échange d'amabilités et d'intérêts communs. J'ai pu également voir arriver les auteurs. Effusions chaleureuses avec les connaissances, découvertes polies et mesurées avec les inconnus. Jusque-là un sans faute. Les lecteurs se sont faits un peu attendre. Puis je vis arriver un couple d'un certain âge. Monsieur tirait une valise à roulettes, les livres de Madame. Celle-ci était une auteure et c'était sa première séance de dédicaces. Étant arrivée fort tard et tout le monde ayant pris place, elle semblait désemparée car personne ne s'intéressait à elle. Arrivée à ma hauteur elle s'adressa à moi, sûrement en réponse à mon sourire amical « où dois-je me mettre, me questionna-t-elle » ? J’avais envie de lui répondre « c'est à cette heure-ci qu'on arrive ? » mais je me suis abstenue par charité. Qui suis-je pour juger ? Sans réfléchir je lui proposai de venir s'installer près de moi puisqu’elle n'avait qu'un livre à exposer donc besoin de peu de place et bien sûr elle accepta soudain soulagée. Cependant dans son regard j’ai vu briller un air condescendant. Mon instinct qui d’ordinaire sonne l’alarme en temps utile ne me prévint pas. Les deux messieurs qui m’entouraient, n’avaient pas envie de se serrer pour lui faire de la place. Mon côté solidarité féminine fut le plus fort. Les premières heures se passèrent tranquillement. Très peu de visiteurs mais des visiteurs « acheteurs ». L’écoute était respectueuse et intéressée. Nos livres partaient au compte-gouttes. Pour un premier salon ma voisine se défendait bien. Dame ! Son livre était la résultante d’une thèse qu’elle avait soutenue et complétée pour les besoins du roman. Madame se targuait d'avoir de l'instruction ! Ces attitudes pitoyables et pathétiques me font toujours sourire. À temps perdu nous échangions des propos anodins mais complaisants. Elle était intriguée par mon livre « retourne de là où tu viens » car j’en parlais avec beaucoup de passion. Elle voulut en savoir un peu plus, le feuilleta. Quelques heures plus tard, fut abordé le sujet brûlant des jours derniers : les caricatures de Charlie Hebdo. Encore une fois mon instinct ne m’a pas dit « tais-toi ». Je n’ai pas vu venir l’orage. Elle s’emballa. Je passe sur tous ses propos emplis de haine. Telle une balle de tennis, ses réponses rebondissaient d’un revers d’esprit stupide. Un instant stupéfaite, je lui répondis, mes yeux bien plantés dans les siens : « Madame, la haine vous enlaidit, votre air hautain sert juste à cacher la bêtise qui vous habite ». Elle a continué à bafouiller je ne sais quelle défense. Je ne l’écoutais plus. Elle m’avait gâché la fête !