Aujourd'hui, tous les journaux télévisés ont ouvert leur journal du soir en tapant les trois coups: « Pierre Mondy est décédé à l’âge de 87 ans. Nous connaissions tous cet immense acteur … ». Ont suivi les éloges, les rétrospectives, je n’écoutais plus. À chaque fois qu’on nous annonce la mort de quelqu’un, suivie immédiatement de son âge, tout bêtement je calcule. En calcul mental j’excelle, point n’est besoin de calculette. C'est dû à ma génération bûchettes. Donc je calcule … ce qu’il me reste à vivre par rapport au « décédé ». Donc là, pour le coup il y a de la marge. Mon cerveau embraye. Je suppute allègrement. J’aurai le temps d’écrire tant de livres. Tant que ça ? Mais oui un livre par an, faîtes le compte ! J’aurai sûrement le temps de marier mes petits enfants et peut-être serais-je arrière grand-mère ? J’aurais le temps de naviguer, de bourlinguer, de rêver. Sauf si la dame en noir en décidait autrement. Alors là j’aurais « tout faux » comme disent les enfants. Je ne veux pas y penser. Mon regard se reporte sur la télévision. Il n’y est plus question de Pierre Mondy mais de pauvres victimes innocentes, qui avaient encore tant d’années à vivre et qui sont tombées sous le couperet de la dictature, de la sauvagerie d’hommes barbares. Visions d’horreur insupportables. Là je prends toute la dimension de l'inanité de mes calculs. Ah tiens on reparle de Pierre Mondy. Il apparaît en gros plan sur l’écran. Et il le crève ! J’ai un petit pincement au cœur. C’est toujours très triste d’apprendre la mort de quelqu’un, mais c’est la vie ! Adieu l’artiste !
Pierre, repose en paix. Tu n’as rien à craindre, on ne t’oubliera jamais.