« Métier d’auteur, métier d’oseur » de Beaumarchais
Samedi 7 avril, levée de bonne heure et de bonheur, hyper motivée et confiante, je me prépare à aller à Aubagne, à la rencontre… de qui, combien m’écouteront ? Interrogation gratuite, tu rendras ta copie vers 18h me susurre une voix venue de mon tréfonds. J’avale vite mon petit déjeuner, mon coffre chargé de tous mes trésors et oh hisse les voiles de mon char à neuf chevaux, équipé du meilleur GPS qui soit sauf quand très vite il perd le nord… Motif : des travaux. Ouille, ouille ! Il faut calmer mon chauffeur qui tempête. Je regarde très discrètement ma montre pour ne pas ajouter de l’huile sur le feu… L’heure tourne en même temps que nous refaisons plusieurs fois le tour des mêmes ronds-points. Superstitieuse, je me dis « c’est mal parti ma fille »… Ma fille (comme je m’appelle dans les durs moments) aime les belles surprises, les sourires échangés, les regards interrogateurs qui valent les plus beaux discours, alors elle espère, croise les doigts, y croit dur comme fer. On va y arriver et on y est arrivé grâce à un chef de chantier qui sourit devant nos moulinets et notre crise d’énervement effective, plante son crayon sur l’oreille, redresse son casque et nous dit « suivez Zacharie ». Nous avons suivi Zacharie (la direction) qui nous a menés droit direct à Aubagne. Fallait le savoir ! Ceci pour expliquer aux lecteurs qu’aller en dédicace c’est une mise en condition !
L’enseigne bleue de Cultura se voit de très loin. Ouf ! Mais qu’il est grand ce magasin ! Immense à me donner le tournis. On vient me chercher à l’accueil et me voici devant une minuscule table carrée (surmontée d’une belle affiche annonçant ma dédicace). Ma déconvenue se lit sur mon visage. Très vite et avec beaucoup de gentillesse, la minuscule table disparaît au profit d’une belle table rectangulaire. Parfait ! Je m’installe rapidement, et tout aussi rapidement je commence à dédicacer, une Miraculée, deux Miraculée, Trois Miraculée… Oh miracle ! Tant pis pour mes autres romans, celui-là me tient trop à cœur. Quelques livres jeunesse. L’ivresse ! Un coup d’œil à ma montre : 11H. À ce rythme je vais manquer de livres. J’avais pourtant prévu large… XXL ! S’en suit brutalement un calme plat. J’ai tout loisir de regarder ce qui se passe autour de moi et là je me rends à l’évidence, les lecteurs se précipitent sur le dernier livre « vu à la télé »… Les hôtesses courent dans tous les sens pour retrouver tel titre, tel autre… Ah ces diables de médias que tout le monde exècre mais qui influencent néanmoins le choix des lectures… Juste derrière moi, veillait une armée de livres de Monsieur Le Pen, au top 3 du classement des meilleures ventes de livres. Chut ne le répétez pas, il ne s’en est pas vendu un seul durant la journée… mes anges veillaient aussi ! Néanmoins la concurrence était rude… Que de livres, que d’auteurs, que d’encre, de papier, de mots, de titres ronflants, politiques, sciences, essais, les faiseurs de bonheur, les conseilleurs qui ne sont pas les (meilleurs) payeurs… et moi, l’illustre inconnue qui jusqu’à 15 heures s’est bien demandé ce qu’elle était venue faire dans cette galère. L’électrochoc est venu de Galwyn. Un adolescent qui m’observait de loin, qui se rapproche jetant un regard gourmand sur mes livres. Je l’interroge « tu aimes lire » ? Me parvient un « j’adore » plein d’enthousiasme pour toute réponse. Deux yeux qui brillent. Moi qui continue « tu lis quoi » ? Réponse tout aussi brève « tout ». Nous avons bavardé avec bonheur jusqu’à l’arrivée de sa maman qui n’était pas du tout étonnée de nous voir en si bon accord. Un futur auteur, je n’en doute pas.
Et c’est reparti à double titre ! Galwyn reparti très heureux avec mon roman dédicacé et c’est reparti pour ma passion qu’un échange enthousiasmé avait régénéré. Inespéré !
Moralité, ne jamais se décourager. Même les galères provoquent de belles rencontres. Finalement il faut savoir capter un regard, interpréter un sourire, tenir tête à des réfractaires qui, in fine, étaient ravis de partager ma petite expérience, moi la petite auteure qu’on aurait pu titrer « l’inconnue d’Aubagne »… Maintenant je le suis un peu moins. Ma valise, toute guillerette par son poids allégé, peut en témoigner ! Nonobstant je reste humble. "Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage"...
Médias ou pas « métier d’auteur, métier d’oseur ». Il faut oser !
Un grand merci à l’équipe de Cultura d’Aubagne et à mon nouveau lectorat qui m’a fait confiance en emportant un bout de moi… Va-t-il m’aimer ? Ne bousculons pas l’ordre des choses. Persévérance et longueur de temps…